Pour mieux intégrer la problématique de la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes dans les politiques publiques, une rencontre de plaidoyer a réuni plusieurs ministères et acteurs institutionnels autour de la Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant. L’objectif vise à coordonner les efforts pour lever les obstacles, renforcer les financements et garantir aux jeunes un accès adapté aux services de santé.
« Nous devons inscrire la santé des adolescents et des jeunes au cœur de nos politiques et plans nationaux », a plaidé le Dr Ndeyetou Diack, spécialiste en santé publique au ministère de la Santé et de l’Hygiène publique. Selon elle, malgré l’importance de cette tranche d’âge dans la population, la question demeure insuffisamment prise en compte, tant en matière de financement que de coordination des actions.
Les données de l’Enquête Démographique et de Santé (EDS) 2023 rappellent l’urgence. Environ 15 % des adolescentes âgées de 15 à 19 ans ont déjà connu une grossesse, un taux qui grimpe à 17,9 % en milieu rural contre 7,4 % en zone urbaine. L’utilisation moderne de la contraception reste faible, autour de 18 %, favorisant grossesses non désirées et avortements clandestins.
La scolarisation des filles illustre également les inégalités : si 98 % d’entre elles accèdent au primaire, seules 50 % terminent le cycle secondaire, une chute encore plus marquée dans les zones rurales. Cette situation limite leurs opportunités d’éducation à la santé et de projection dans l’avenir.
Autre indicateur préoccupant : 29 % des femmes de 15 à 49 ans déclarent avoir subi des violences physiques ou sexuelles de la part de leur partenaire au moins une fois dans leur vie. Or, ces violences renforcent la vulnérabilité des adolescentes et constituent un frein supplémentaire à leur autonomie sanitaire et sociale.
« Les freins à l’accès aux services sont nombreux : offres de soins inadaptées, manque de personnels formés, tabous sociaux persistants et contraintes institutionnelles liées aux lois en vigueur », a rappelé le Dr Diack.
À ces obstacles s’ajoute une faible mobilisation budgétaire, alors même que la jeunesse représente une part importante de la population et un levier majeur pour le développement durable.
Face à ce constat, la rencontre de plaidoyer a rassemblé plusieurs départements ministériels – Santé, Éducation, Justice, Jeunesse, Famille – ainsi que des ONG et partenaires techniques. L’approche retenue repose sur la concertation et la coordination : « Nous devons élaborer une feuille de route claire, identifier les stratégies et les acteurs responsables, et surtout mobiliser les ressources financières et techniques nécessaires », a insisté le Dr Diack.
Le plaidoyer s’articule autour de l’amélioration de la santé sexuelle et reproductive des jeunes est non seulement une question de droits humains, mais aussi un investissement pour l’avenir.
« Sans prise en charge adéquate, nous risquons de compromettre l’éducation, la santé et la participation citoyenne d’une génération entière », a averti le Dr Diack.
Lansana DIANDY