Le Front populaire qui se met en place passe pour une double opportunité pour Khalifa Sall de devenir chef de l’opposition et patron du Ps. C’est presque acté. Le patron de Taxawu Sénégal, Khalifa Ababacar Sall, est sûr d’être le coordonnateur du Front populaire. Ce nouveau cadre de l’opposition vient d’être porté sur les fonts baptismaux. Son objectif est de se dresser contre le tandem Diomaye Sonko. Cette nouvelle coalition regroupe en plus de la LD et du PIT, l’AFP et le PS. Au regard de l’ambiance ayant prévalu lors de l’installation du directoire du Front populaire, tout laisse croire que Khalifa Ababacar Sall nage dans un plébiscite au sein de l’opposition. C’est, en effet, par acclamation que le patron de Taxawu Sénégal a été désigné coordonnateur de ce nouveau cadre de l’opposition. En attendant de voir ce que vaut cette coalition en termes de mobilisation sur le terrain, l’ancien maire de Dakar peut s’enorgueillir d’ores et déjà d’être en pôle position pour arracher le statut de chef de l’opposition. En retrait aux dernières législatives au profit du maire déchu, Barthélémy Dias, Khalifa Ababacar Sall, 69 ans, reprend les devants. Sa posture de coordonnateur du Front populaire fait de lui le leader de l’opposition. Son parcours conforte, sans doute, le choix porté sur lui.
Entré en politique à l’âge de 12 ans, il devient membre de l’Union des jeunes progressiste sénégalais (UPS), devenu plus tard le Parti socialiste. En 1983, il entre à l’Assemblée nationale et hérite des Jeunesses socialistes jusqu’en 1996. En juin 1993, Khalifa Ababacar Sall est nommé ministre délégué auprès du Premier ministre. Khalifa Sall est nommé ministre du Commerce et de l’Artisanat en 1998. Et c’est de 1984 à 2001 qu’il occupe le poste d’adjoint au maire de Dakar, Mamadou Diop. Maire de la nouvelle commune d’arrondissement de Grand Yoff de 1996 à 2000. Entretemps, il est élu maire de Dakar en 2009. En 2017, élu pour un deuxième mandat, il est placé en détention en mars 2017 pour détournement de fonds publics. Khalifa Ababacar Sall écope d’une peine de 5 ans, il est gracié dès 2019 par le président Macky Sall. Néanmoins, cette condamnation l’empêche de se présenter à l’élection présidentielle de 2019.
En 2024, l’ancien maire de Dakar, candidat à la Présidentielle subit une lourde désillusion. Il est, en effet, classé troisième (1,56%) derrière Amadou Bâ (35,79%) et le candidat du PUR, Amadou Aliou Dia (2,80%). A l’évidence, Khalifa Sall nourrit la volonté de brûler la politesse à Amadou Bâ, considéré, du point des résultats de la Présidentielle et des dernières Législatives avec ses 7 députés contre 4 pour le camp de taxawu, comme le chef de l’opposition. Plus dégourdi et plus visible sur l’espace public que Amadou Bâ, Khalifa Sall joue cherche, visiblement, à noyer son concurrent. En vérité, Amadou Bâ a rarement été au front politique. Sa candidature à la Présidentielle du 24 mars est le résultat du choix de l’ancien chef de l’Etat. Des pontes de l’ancien régime comme Mame Mbaye Niang s’étaient ouvertement positionnés contre lui. “Je ne soutiens pas Amadou Bâ. Je l’ai annoncé ici avec votre confrère Pape Ngagne Ndiaye (Ndrl : animateur de l’émission Faram Faccë)”, avait martelé Mame Mbaye Niang ajoutant avoir dit partout être avec Macky Sall pas avec un autre. “Je n’ai pas peur de mes dires. Et je ne dis que la vérité”, précisait-t-il. Une autre forte voix, Souleymane Jules Diop, invité du “Grand Jury” de la RFM avait déclaré, parlant de son candidat Amadou Bâ : “Je le trouve amorphe. Je trouve qu’il ne montre pas assez aux Sénégalais, aux gens de sa majorité, qu’il a les épaules, qu’il a l’étoffe. Il ne le fait pas assez, il doit se bouger, il doit aller vers les gens, il doit rassurer la majorité.” Face à autant d’hostilité, Amadou Bâ n’avait pas bronché.
Les derniers coups reçus par le candidat de BBY assénés par Karim Wade, candidat recalé pour double nationalité, avaient laissé de marbre Amadou Bâ. Dans son discours du 3 février où il abrogeait le décret convoquant le corps électoral, Macky Sall n’avait ni infirmé, ni confirmé les accusations de corruption portées contre son PM et les deux juges du Conseil constitutionnel. Le président de la République avait également “laissé faire” le parlement dans sa volonté d’adopter la résolution pour la mise en place d’une commission parlementaire. Aujourd’hui que le débat commence à s’installer au sujet du chef de l’opposition, Amadou Bâ, arrivé deuxième le 24 soir du 24 mars 2024 refuse encore de briser le silence. Là aussi, la bataille se mène par procuration ! L’autre challenge du patron de Taxawu Sénégal est la direction du Parti socialiste. Membre annoncé du Front populaire, Khalifa Sall réalise, ainsi, une opportunité inouïe de se rapprocher et même de se réconcilier avec ses anciens camarades du Ps. Depuis son départ du parti de Colobane en 2009, Khalifa Sall n’avait plus de lien avec le Ps. La mise en place du Front populaire coïncide avec une sorte de crise de leadership chez les socialistes. La fameuse tribune de Serigne Mbaye Thiam daté du 5 janvier dernier en est une parfaite illustration. Serigne Mbaye Thiam retrace les différentes postures du Ps et met le doigt sur “un leadership en mal d’inspiration et d’initiative, et une démobilisation de ses structures de base”. Un état de fait qui appelle pour Thiam “humilité, réalisme et audace pour nous réinventer, nous rassembler et bâtir une alternative porteuse d’espoir”. Dans un tel contexte, un retour au bercail de Khalifa Ababacar Sall pourrait lui ouvrir grandement les portes de la direction du Ps. Une hypothèse d’autant plus sérieuse que Khalifa Sall n’a pas encore de parti. Il est encore à la tête de mouvement politique.